Nicolas Razafindratsima, ingénieur statisticien

Nicolas Razafindratsima travaille comme statisticien d’enquêtes au Service des enquêtes et sondages de l’Ined.

© Ined

Quel parcours vous a mené à l’Ined ?

Je suis originaire de Madagascar et je suis venu en France pour mes études supérieures. Après les classes préparatoires aux grandes écoles d’ingénieurs (maths sup/maths spé), j’ai intégré l’ENSAI (l’école de la statistique et du traitement de l’information) pour devenir ingénieur statisticien. J’ai ensuite étudié la démographie à l’Idup, l’institut de démographie de l’université de Paris I, et je me suis inscrit en thèse de démographie économique à Sciences Po. Mon sujet portait sur Madagascar, où je suis retourné pour faire mes recherches. C’est là que j’ai commencé à travailler avec l’Ined, comme correspondant à Madagascar pour un projet de recherche. Un chercheur qui connaissait mon parcours m’a alors encouragé à me porter candidat à un poste de statisticien. C’est ainsi que j’ai été recruté à l’Ined à Paris en 2001. Parallèlement, j’ai poursuivi ma thèse, que j’ai terminée quatre ans plus tard. Mon parcours est un peu atypique, je suis docteur en démographie économique et ingénieur statisticien. Mais je me sens plutôt une fibre de statisticien, même si j’ai peut-être un regard un peu différent d’un statisticien « pur et dur ».

Quel est votre rôle au sein de l’Ined ?

Je travaille comme statisticien d’enquêtes au Service des enquêtes et sondages, le plus gros service de l’Ined, qui produit des données d’enquêtes pour les projets des chercheurs. J’interviens d’abord en début d’enquête pour étudier comment « tirer » l’échantillon statistique. Les enquêtes sont rarement menées auprès de l’ensemble de la population que l’on veut étudier, mais seulement auprès d’une petite partie. Pour constituer cet échantillon, il faut d’abord examiner la question de la « base de sondage » : se demander s’il existe une liste de tous les individus concernés par l’enquête et quelles informations elle apporte. Ensuite, on détermine l’échantillon en fonction de critères statistiques, de la faisabilité, des objectifs, du budget…
La base de sondage peut être constituée de personnes physiques, mais aussi parfois de quartiers, de documents… Dans l’enquête Fin de Vie, il s’agissait de la liste des décès enregistrés dans l’année. Pour l’enquête à Dakar du projet MAFE (Migrations between Africa and Europe), en l’absence de listes, le territoire a été découpé en quartiers. Certains ont été sélectionnés et les enquêteurs ont d’abord répertorié les habitants de chaque logement. Les questions ont été posées aux personnes repérées lors de cette première phase, la phase de dénombrement.
En fin d’enquête, j’interviens à nouveau pour m’assurer que l’échantillon est bien « représentatif » de la population étudiée. J’étudie les non-réponses à l’enquête. Et je calcule des pondérations pour opérer ce qui s’appelle un « redressement ». L’échantillonnage et le redressement constituent les deux grandes étapes statistiques de la production des données d’enquêtes. C’est ainsi que les données d’enquêtes peuvent être attribuées par extrapolation à toute la population concernée.
Le service réalise aussi des études méthodologiques. Cela consiste à se demander, par exemple, si une personne répond différemment quand elle est interrogée en ligne via internet ou en face-à-face. Ou à étudier l’ « effet enquêteur », pour savoir si le sexe, l’origine de l’enquêteur ou autre peuvent avoir une influence sur les réponses, notamment sur des sujets sensibles. On tente aussi de mesurer les marges d’erreurs et la précision du sondage.

Quelle est pour vous la spécificité de l’Ined ? Qu’appréciez-vous le plus au sein de l’institut ?

J’aime l’originalité des travaux et leur diversité. Par définition, un projet de recherche mené à l’Ined est toujours novateur. C’est très stimulant. Par exemple, dans les années 90, l’Ined a conduit à Paris les premières enquêtes sur les personnes sans domicile menées en France. Le service des enquêtes a joué un rôle pionnier en mettant au point la méthodologie reprise ensuite par l’Insee au niveau national. Enfin et surtout, j’apprécie la qualité des rencontres à l’Ined, un institut à taille humaine. C’est une grande chance de pouvoir collaborer avec des techniciens et des chercheurs de haut niveau, des experts dans leur domaine, qui vous font avancer aussi.