Lidia Panico

répond à nos questions à propos de la British Millennium Cohort 

Ined- Colette Confortès

Lidia Panico a rejoint l’Ined le 1er octobre 2012. Ses recherches portent sur les facteurs socio-démographiques influençant le développement de l’enfant, ainsi que sur l’évolution des structures familiales. Elle utilise principalement les enquêtes longitudinales et les cohortes d’enfants.

(Entretien réalisé en novembre 2012)

Pouvez-vous nous décrire la British Millennium Cohort? En quoi est-elle différente de la Cohorte française ELFE ?

La cohorte du millénaire (Millenium Cohort Study, MCS) est une enquête pluridisciplinaire longitudinale qui suit environ 19 000 enfants nés au Royaume-Uni en 2000-2001. Les Britanniques ont une longue expérience d’études longitudinales de cohortes nationales depuis la naissance, MCS étant la plus récente. Les informations collectées touchent différents sujets comme la parentalité, la garde des enfants, le comportement et le développement cognitif des enfants, la santé des parents et des enfants, le niveau de formation et l’emploi des parents, les revenus et la pauvreté, le logement, le quartier et la mobilité résidentielle, le capital social, ou l’ethnicité. Les données des quatre premières vagues (collectées aux 9 mois, 3 ans, 5 ans et 7 ans de l’enfant) sont consultables librement et peuvent être téléchargées par tout chercheur, britannique ou à l’étranger.

A bien des égards ELFE est similaire à l’enquête MCS, ce qui signifie que des comparaisons internationales seront possibles. Il y a des différences dans la manière dont les échantillons ont été définis (en fonction des maternités pour ELFE, et du lieu de résidence 9 mois après la naissance pour MCS), ou dans la collecte des données (ELFE en collecte plus que MCS au cours de la prime enfance), mais dans l’ensemble les deux enquêtes sont très comparables. Une dimension originale de ELFE est l’attention portée aux pères : très peu d’études longitudinales les impliquent au même degré que les mères, en particulier après une séparation ou un divorce, où une étude comme MCS les perd souvent de vue. Les recueils biologiques dès le séjour en maternité et le recueil d’informations sur l’exposition à des polluants sont aussi un apport important et très intéressant de ELFE.

Grâce à cette étude, vous avez pu analyser les conséquences des changements des structures familiales (séparation ou remise en couple de parents) sur la santé des enfants de moins de 5 ans. Quelles sont-elles ?

Comme d’autres enquêtes l’ont montré précédemment, la stabilité familiale est corrélée avec le bien être des jeunes enfants. Cela a surtout été observé sur le plan cognitif et du développement, mais dans cette enquête nous montrons également l’impact sur la santé, notamment les problèmes respiratoires, le surpoids et l’obésité, ou les accidents. Cependant, nous soulignons qu’au Royaume Uni, le profil socio-économique des foyers connaissant une instabilité familiale est très différent de celui des unions stables : ils sont plus pauvres, moins diplômés, et sont plus jeunes au moment de la naissance des enfants de la cohorte. Ces différences socio-économiques sont aussi fortement liées à la santé des enfants. Une fois ces différences socio-économiques sont intégrées dans les modèles, on ne constate pas d’écart notable de santé physique des enfants en fonction de la structure familiale en elle-même.

Les évolutions socio-économiques du ménage ont-elles autant de conséquences ?

La séparation se traduit par une chute des revenus du foyer. Cette chute est particulièrement brutale pour les couples qui étaient mariés, comparés à ceux qui étaient en cohabitation avant de se séparer. Inversement, les mères célibataires qui se remettent en couple connaissent une hausse du revenu du ménage. Toutefois, selon nos modèles, c’est la situation socio-économique au départ de l’enquête (avant séparation ou remise en couple) qui a le plus d’impact sur le devenir des enfants, plutôt que le changement de revenu en cours d’étude. Une fois encore cela souligne à quel point, au Royaume-Uni, le profil socio-économique des familles instables diffère de celui des couples qui restent ensemble.