L’expérience de la ménopause en France et en Tunisie: approche socio-anthropologique

le Lundi 23 Mai 2011 à l’Ined, salle Sauvy

Discutante: Thérèse Locoh (INED)

La ménopause comporte une dimension biologique et une dimension socioculturelle qui offrent d’importantes variations selon les ethnies, les sociétés, les cultures. Malgré de nombreuses recherches, les facteur déterminant ces variations ne sont pas encore bien connus. Nous avons effectué une recherche qualitative comparative sur les facteurs influençant l’expérience et les représentations de la ménopause dans deux pays, la Tunisie et la France. en 2007-2008 au moyen de 75 entretiens approfondis auprès de 18 Tunisiennes rurales et 17 Tunisiennes urbaines en Tunisie, 20 Tunisiennes en France et 20 Françaises en France. Nous avons identifié trois types.
1. La ménopause douloureuse, l’âge du désespoir, avec des symptômes intenses et un sentiment de forte dévalorisation sociale. Elle se retrouve chez les Tunisiennes de milieu populaire, en Tunisie et en France.
2. La ménopause comme perte de valeur esthétique et sociale, avec peu de symptômes mais avec la perception de modifications morphologiques et de l’apparence. Elle prédomine chez les Tunisiennes de classe moyenne en Tunisie et en France et chez quelques Françaises de classes moyennes.
3. La ménopause tranquille et déstigmatisée, avec peu de symptômes, parfois une prise de traitement hormonal, une valeur sociale peu ou pas modifiée. Elle prédomine chez les Françaises de classes moyennes et elle est retrouvée chez quelques Tunisiennes de classes moyennes en France.
La répartition de ces trois types indique que l’expérience de la ménopause est pour l’essentiel socialement construite dans ces deux populations et que les différences ne sont probablement pas déterminées par des facteurs biologiques. La différence principale se trouve en effet à l’intérieur du groupe des Tunisiennes, entre classes populaires et classes moyennes. Le rôle du pays de résidence n’apparaît qu’à milieu social égal entre Tunisiennes et Françaises de classes moyennes. La charge de travail physique, le niveau social, l’instruction, l’accès à un travail extérieur, le degré d’indépendance économique, le degré d’autonomie dans la famille et dans la vie sexuelle, ainsi que la force des représentations de la physiologie féminine et des normes morphologiques du corps féminin déterminent fortement la symptomatologie, l’expérience sociale et les représentations de la ménopause.