Les familles transnationales dans le contexte migratoire français : la diversification des formes familiales depuis les années 1960

le Lundi 24 Juin 2013 à l’Ined, en salle Sauvy, de 14h à 15h

Présenté par Tatiana Eremenko (INED / Université Bordeaux IV) - Discutant : Frank Temporal (Université Paris Descartes-CEPED)

Les dernières décennies, caractérisées par un accroissement des flux migratoires et leur féminisation au niveau mondial, ont également vu le développement des travaux sur les familles transnationales, dont les membres résident dans différents pays. Ces familles soulèvent de nombreuses questions, surtout lorsqu’il s’agit de la séparation géographique des jeunes enfants et de leurs parents : comment est organisé le fonctionnement de la famille à distance ? Ce mode de vie n’est-il pas préjudiciable à ces membres ? Les travaux existants portent principalement sur des femmes migrant des pays de l’Europe de l’Est, de l’Amérique Latine ou d’Asie, et connaissant des situations (légales, professionnelles) précaires à leur arrivée. Le contexte français n’a été que peu étudié. Ces caractéristiques distinctes pourraient apporter des éléments nouveaux pour la compréhension de ces situations, notamment leur place dans les trajectoires migratoires des familles et les facteurs de risque leur étant associés.
Cette présentation, issue de ma recherche doctorale, s’articule autour de trois points : la méthodologie mise en œuvre pour identifier les familles résidant de part et d’autre de frontières nationales dans les données statistiques existantes ; l’évolution du nombre des familles transnationales en France depuis les années 1960 ; l’étude des relations de ce mode de vie avec les caractéristiques des migrants et de leurs familles (le sexe, l’origine géographique, la composition familiale, la situation légale). Les séparations géographiques des familles sont surtout caractéristiques des débuts d’un flux migratoire et leur nombre était maximal au sommet des flux migratoires dans les années 1970 et 1980. On estime que jusqu’à un tiers des hommes originaires de certains pays d’Afrique était en ménage transnational à cette époque. Depuis cette période, leur nombre baisse régulièrement, et la reprise des flux migratoires à destination de la France au début des années 2000 n’a pas inversé cette tendance. Au-delà de ce premier constat numérique, c’est surtout la composition de ces familles qui a changé. Une proportion grandissante d’entre elles est dirigée par des femmes et il s’agit plus souvent des familles recomposées avec des enfants plus âgés que par le passé. Ces caractéristiques ont un impact sur les pratiques de ces familles, ainsi que leurs perspectives de réunification dans l’avenir.