Consommations de tabac et d’alcool au cours de la grossesse: rôle de facteurs sociaux en fonction du statut de migrant

le Lundi 07 Avril 2014 à l’Ined, salle Sauvy, de 14h à 15h

Intervenant: Maria MELCHIOR (INSERM) ; discutant: Stéphane Legleye (Ined)

De nombreuses femmes consomment du tabac et d’alcool au cours de la grossesse, ce qui peut augmenter le risque de difficultés pour l’enfant à court et à plus long terme (petit poids de naissance, prématurité, difficultés cognitives et psychologiques). Les facteurs associés à ces consommations incluent des difficultés sociales et économiques (chômage, faibles revenus, absence du conjoint), psychologiques, ainsi que les consommations de tabac et d’alcool de l’entourage. Les femmes françaises consomment plus que les femmes migrantes, néanmoins les facteurs associés à ces consommations peuvent être distribués de manière inverse. Dans cette étude nous examinons les liens entre facteurs démographiques, socioéconomiques, de santé, et caractérisant le père de l’enfant et les niveaux de consommation de tabac et d’alcool des 18 316 femmes de l’enquête ELFE qui ont participé à l’étude en maternité en fonction de leur statut migratoire.

Les analyses montrent que les femmes nées en France consomment plus de tabac et d’alcool que celles nées à l’étranger (respectivement : tabac : 21.9 vs. 8.8% ; alcool : 40.4 vs. 22.9% ; binge drinking : 3.2 vs. 2.9%). La probabilité de consommer ces produits psychoactifs est associée aux caractéristiques démographiques, socio-économiques, de santé, et du père de l’enfant, avec quelques spécificités en fonction du statut migratoire des femmes : les femmes nées à l’étranger vivant sans conjoint ont une probabilité particulièrement élevée de consommer de l’alcool (OR ajusté : toute consommation d’alcool : 2.20 ; binge drinking : 3.06). Une situation socioéconomique défavorable est associée à un niveau plus élevé de tabagisme et de binge drinking chez les femmes nées en France, tandis que chez les femmes nées à l’étranger on observe la tendance inverse. Enfin, lorsque le père de leur enfant est né à l’étranger, les mères ont des niveaux de consommation de tabac et alcool faibles - qu’elles soient elles-mêmes nées à l’étranger ou pas - suggérant que les caractéristiques de l’entourage jouent également un rôle.

Au total, cette étude suggère que pour tenter de diminuer les niveaux de consommation de tabac et d’alcool au cours de la grossesse, les professionnels de santé et de prévention doivent tenir compte de multiples facteurs dont certains varient selon le statut migratoire des femmes.