Chantal Cases

Interview-bilan avec la directrice de l’Ined

© Raphaël Debengy

Économiste et statisticienne, diplômée de l’École nationale de la statistique et de l’administration économique (Ensae), Chantal Cases dirige l’Institut national d’études démographiques (Ined) depuis octobre 2009. Elle dresse un bilan du dernier contrat d’objectifs qui arrive cette année à son terme et fait une synthèse des évaluations de l’activité et de l’organisation de l’Institut.

(Entretien réalisé en août 2015)

 

 

Le Contrat d’objectifs (2011-2015) arrivant à son terme, quel bilan dressez-vous de l’activité scientifique ?

Les grandes thématiques démographiques ont fait l’objet de recherches approfondies et renouvelées, accompagnées de la production et de l’exploitation d’enquêtes et de données originales qui constituent de véritables infrastructures partagées avec l’ensemble des chercheurs en SHS. Elles concernent la santé et la mortalité (enquête FECOND sur la santé sexuelle et reproductive, reconstitution et analyse des causes de décès), la configuration des familles, les relations intergénérationnelles et le vieillissement (enquête sur famille et logement, projet génération et genre, enquête sur les parcours individuels et conjugaux, étude longitudinale sur les enfants placés, enquête sur la fin de vie), des migrations et de leurs conséquences (les enquêtes MAFE sur les migrations entre l’Afrique et l’Europe et Trajectoires et Origines). Le service des enquêtes et sondages a également été très actif dans la construction du volet quantitatif de l’équipex DIME-SHS, porté par Sciences Po. La co-construction de la cohorte d’enfants ELFE avec 97 équipes associées (réparties dans 16 groupes thématiques et travaillant sur 80 projets différents) se poursuit et commence à produire des résultats.

La production scientifique a également été nourrie pour l’histoire longue, qui a fait l’objet de solides publications. Les études de genre se sont développées et l’enquête sur les violences fondées sur les rapports de genre, prioritaire dans le contrat, a été lancée en 2015. La démographie économique s’est développée dans les labex : iPOPs, porté par l’Ined, et le partenariat avec OSE, porté par l’École d’économie de Paris. Une chaire mixte avec Paris 1 a ainsi été créée. L’effet des politiques familiales et sociales sur les comportements démographiques, a été largement traité pendant la période, dans une optique souvent comparative, grâce à l’obtention de financements européens.

Les analyses comparatives internationales et les recherches sur les pays du Sud étaient aussi une priorité du contrat, que pouvez-vous nous dire ?

Effectivement, les chercheurs de l’Ined ont beaucoup travaillé en partenariat avec leurs collègues européens et nord-américains, mais aussi au Sud, en Afrique subsaharienne et Asie, en investissant là encore dans des sources de données indispensables (observatoires de population en Afrique, enquête sur les conséquences des déséquilibres des sex-ratios à la naissance en Chine…). Les travaux sur le Maghreb ont aussi été développés. Et en France au-delà de l’hexagone, un indispensable socle de données et de recherches sur les comportements démographiques dans les DOM a été constitué avec la collecte et l’exploitation des enquêtes MFV (migration, famille, vieillissement), en partenariat avec l’INSEE et les acteurs locaux.

L’Ined a été évalué en 2014 et 2015, quelles en sont les conclusions ?

L’ensemble des évaluations externes réalisées sur la période ont été très positives et leurs recommandations nous seront très utiles pour préparer l’avenir.

Le comité AERES qui a évalué les unités de recherche conclut en substance que « L’Ined est un établissement d’excellence du point de vue de la politique de recherche, de ses infrastructures de support et de ses réalisations ». Il juge que « le rayonnement académique de l’Institut et de beaucoup de ses chercheurs en France et à l’étranger est indiscutable » et apprécie « une restitution importante d’informations et de connaissances à l’ensemble de la société », ainsi que la formation doctorale et la politique d’accueil soutenue de chercheurs étrangers.

Le rapport définitif d’évaluation de l’établissement par le HCERES est lui aussi très favorable, soulignant que « le chemin parcouru depuis la précédente évaluation, en 2010, est impressionnant ». La stratégie partenariale en France (Comues, projet de Campus Condorcet), les succès aux appels à projets nationaux et internationaux, la réalisation de grandes enquêtes figurent parmi les points forts mis en avant par le comité.

Le labex iPOPs a été lancé en 2011, qu’apporte-t-il à l’Ined et à la recherche en général ?

Grâce à iPOPs, l’Ined s’est engagé dans une politique d’accueil plus étendue d’enseignants chercheurs générant ainsi de nouvelles productions de connaissances. En 2010, ils étaient 25 doctorants accueillis et maintenant ils sont plus de 40. Le dispositif de financements des contrats doctoraux s’est ainsi renforcé, une charte de l’accueil doctoral a été créée et un comité de sélection international a été mis en place.

Cette année, l’ANR a réalisé un point d’étape à mi-parcours des laboratoires d’excellence sélectionnés en 2011 dans le cadre des investissements d’avenir. Le rapport sur iPOPs est très bon. Il note ainsi que le labex a renforcé la visibilité de la démographie et que « le réseau iPOPs attire une nouvelle génération de jeunes chercheur-e-s » et qu’il « permet également aux chercheurs seniors de libérer plus de temps pour mener de nouvelles recherches et publier dans les meilleures revues ».