Pays du Sud : les grands enjeux de la croissance urbaine

Press release Published on 26 September 2019

C’est dans les pays moins développés, souvent dits aussi du « Sud », que les citadins sont les plus nombreux : 3,2 milliards contre moins de 1 milliard au « Nord », avec un processus d’urbanisation extrêmement rapide et un accroissement continu de la taille des grandes villes. Selon les dernières projections des Nations unies, la population urbaine des pays du Sud devrait s’accroître de quelque 2,5 milliards de personnes d’ici 2050. En s’appuyant sur des données récentes des Nations Unies, Jacques Véron, Directeur de recherche à l’Institut national d’études démographiques (Ined), explique ce processus et les défis que soulève ce phénomène, qui pour l’heure, ne s’autorégule pas.

2,5 milliards de citadins de plus en 2050

Selon les dernières projections des Nations unies, la population urbaine des pays du Sud devrait s’accroître de quelque 2,5 milliards de personnes d’ici 2050, dont le tiers tiendrait seulement à la croissance urbaine de trois États : l’Inde (416 millions de citadins en plus), la Chine (255 millions) et le Nigeria (189 millions). Les taux de croissance annuels moyens de la population urbaine au Nord et au Sud sont pour le moins contrastés : 0,6 % dans les pays plus développés, contre 2,56 % dans les pays moins développés sur la période 2010-2015. Selon Jacques Véron, ces différences de rythme pourraient tenir au fait que ces pays sont à des stades différents de la transition urbaine. Le potentiel de croissance urbaine, lié à l’exode rural, reste donc beaucoup plus élevé dans les pays du Sud moins avancés dans cette transition. Mais les migrations internes ne sont pas seules en cause : la croissance naturelle – excédent des naissances sur les décès – contribue davantage à la croissance urbaine au Sud qu’au Nord, du fait d’une fécondité urbaine plus élevée.

Des disparités dans la transition démographique

Dans une optique de développement économique et social, l’urbanisation est souvent considérée comme un facteur accélérateur, voire de déclenchement de la transition démographique. Ainsi, la mortalité infantile est moindre en ville qu’en zone rurale et les familles y sont de taille plus réduite. Cependant, comme l’explique Jacques Véron, le lien entre urbanisation et transition démographique est complexe. D’après les enquêtes démographiques et de santé conduites au Cameroun, on peut constater que l’écart s’est creusé entre les ruraux et les citadins ces 20 dernières années, avec une baisse de la fécondité de plus de 1 enfant pour les citadins. À l’inverse, en Afrique du Sud, d’après l’enquête démographique et de santé de 2016, la fécondité diffère de manière somme toute limitée selon la résidence : le nombre moyen d’enfants par femme est de 2,4 en milieu urbain et de 3,1 en milieu rural. En Colombie, selon l’enquête de 2015, la fécondité urbaine (1,8 enfant par femme) se situe en dessous du niveau de remplacement des générations (de l’ordre de 2,1 enfants par femme), mais la fécondité rurale n’est pas beaucoup plus élevée (2,6 enfants par femme).

La question de la taille optimale des villes

À l’échelle mondiale, la population urbaine se répartit aujourd’hui globalement à égalité entre habitants de villes de moins et de plus de 500 000 habitants. Les Nations unies estiment toutefois que le processus actuel d’urbanisation pourrait s’accompagner d’un accroissement du poids des grandes villes (plus de 500 000 habitants), qui concentreraient toutes une part plus importante de la population mondiale en 2030. Or, la question de la taille de ville au-delà de laquelle les inconvénients de la croissance l’emportent nettement sur les avantages se pose plus spécifiquement pour les pays du Sud, comme le souligne Jacques Véron. En effet, non seulement l’urbanisation ne s’autorégule pas, mais toute politique visant une maîtrise de la croissance urbaine semble vouée à l’échec au vu des expériences dans ce domaine.

Des défis propres aux pays du Sud

Les villes du Sud sont confrontées à des défis qui leur sont propres. En Afrique, par exemple, moins de la moitié de la population urbaine bénéficie d’installations sanitaires de qualité et un tiers seulement a accès à un réseau d’eau courante. Et la croissance urbaine renforce l’acuité de ces défis. Entre 2000 et 2016, la population de l’agglomération urbaine de Lagos est ainsi passée de 7,3 millions à 13,7 millions d’habitants. Les nouveaux arrivants dans les villes du Sud « s’installent » en grande partie dans une situation de grande précarité. Dans les pays moins développés considérés dans leur ensemble, la population vivant dans des bidonvilles représente ainsi le quart de la population urbaine, et près de la moitié de la population urbaine en Afrique.

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