Recent demographic trends of France:a singularity in Europe?

Press release Published on 12 December 2019

Chaque année, conformément à sa mission d’information du public sur les questions démographiques prévue dans ses statuts, l’Ined revient de manière détaillée sur les grands chiffres et tendances de la population de la France. Cet article propose par ailleurs un approfondissement sur une thématique particulière. L’accent est mis cette année sur les comparaisons européennes, montrant en quoi la France fait figure d’exception démographique à l’échelle de l’Union européenne des 28 (UE-28). Ainsi, la France demeure le pays avec l’accroissement naturel le plus élevé d’Europe. Elle est le cinquième pays d’accueil d’étrangers de pays tiers mais son taux d’immigration est l’un des plus faibles d’Europe. La France reste le pays le plus fécond avec un âge à la maternité relativement jeune. D’autre part, les interruptions volontaires de grossesse sont en augmentation et la mortalité infantile est relativement plus élevée que dans la plupart des autres pays européens. L’article de conjoncture sera publié dans la revue Population 4-2019.

L’accroissement naturel le plus élevé d’Europe

Le 1er janvier 2019, la France comptait 67 millions d’habitants, dont plus de 2 millions vivant dans les départements et régions d’outremer. L’accroissement annuel – variation de l'effectif de la population au cours de l'année – a de nouveau diminué en 2018 et reste principalement soutenu par un nombre de naissances supérieur à celui des décès. La France se distingue par son accroissement naturel positif — le plus élevé en Europe en valeur absolue et parmi les plus forts en valeur relative après l’Irlande, Chypre, le Luxembourg et la Suède. Dans la majorité des pays de l’UE-28, l’accroissement naturel était négatif en 2018, en particulier dans les pays de l’Est et les pays baltes. L’accroissement naturel de la France atteint toutefois un minimum historique depuis 40 ans.

Le cinquième pays d’accueil derrière l’Allemagne, le Royaume-Uni, l’Espagne et l’Italie mais un taux d’immigration parmi les plus faibles d’Europe

En 2017, le flux d’entrées en France d’étrangers originaires de pays tiers a représenté 238 000 personnes, le plus haut niveau depuis 2000 (+ 9 % par rapport à 2016, et + 32 % par rapport à 2012). Il s’agit majoritairement de personnes en provenance d’Afrique, même si le nombre de personnes originaires d’Asie est lui aussi en augmentation. Les nouveaux entrants issus des pays tiers sont majoritairement des hommes, du fait du poids croissant des entrées en provenance d’Afrique et d’Asie traditionnellement plus masculines. Bien qu’une part importante des titres de séjour soit délivrée pour un motif familial (45,2 %), ce sont les motifs « humanitaires » (réfugiés, apatrides, demandeurs d’asile) dont la part augmente le plus en 2017. À l’échelle européenne, en se basant sur les statistiques délivrées par Eurostat, la France est le 5e pays européen d’immigration selon le nombre d’entrées (derrière les 4 autres pays européens les plus peuplés que sont l’Allemagne, le Royaume-Uni, l’Italie et l’Espagne), mais compte parmi les pays dont le taux d’immigration est le plus faible (inférieur à 0,5 %).

 

Le pays européen le plus fécond avec un âge à la maternité relativement jeune

Pour la quatrième année consécutive, le nombre annuel de naissances enregistrées en 2018 (759 000) est en baisse du fait de la diminution de la population des femmes en âge de procréer, mais aussi de la fécondité. L’indice conjoncturel de fécondité est de 1,87 enfant par femme en 2018, et l’âge moyen à la maternité recule encore (30,6 ans). La baisse de la fécondité concerne principalement les 20-29 ans et les naissances de rang 1. À l’échelle européenne, la France reste le pays le plus fécond avec un âge à la maternité relativement jeune par comparaison aux autres pays. La France est, avec l’Irlande, le seul pays dont les générations nées durant les années 1980 atteindront un niveau de fécondité assurant le renouvellement des générations (2,1 enfants par femme).

La France se situe à un niveau élevé d’interruptions volontaires de grossesses (IVG)

Le nombre d’interruptions volontaires de grossesses (IVG) est en augmentation en 2018 (224 300 contre 217 800 en 2017), sans atteindre les niveaux de 2013 et 2014. Cette augmentation concerne surtout les femmes de 25 ans et plus. Le nombre moyen d’avortement par femme s’élève à 0,56, en légère augmentation lui aussi. La France, avec la Bulgarie et la Grande-Bretagne, font partie des pays de l’UE dont les taux de recours à l’IVG sont les plus élevés.

Les mariages moins fréquents et plus tardifs que dans le reste de l’Europe

Les nombres de mariages et de pacs ont tous deux augmenté en 2017 mais l’écart entre le nombre de mariages (233 915) et le nombre des pacs (193 950) s’est encore réduit et atteint son plus faible niveau historique. Les mariages sont moins fréquents et plus tardifs en France que dans le reste de l’Europe. L’existence du pacs comme forme alternative au mariage accessible à tous les couples, singularité de la France en Europe, pourrait expliquer partiellement la plus faible propension à se marier en France. Une proportion non négligeable de mariages unit des couples initialement pacsés. Plus de la moitié des pacs enregistrés en 2007 sont dissous avant leur dixième anniversaire, d’un commun accord pour la plus grande partie d’entre eux, mais aussi par un mariage pour une part non négligeable (15 % à 20 %).

L’espérance de vie augmente encore mais à un rythme ralenti

En 2018, plus de 600 000 décès ont été enregistrés en France. Ce niveau n’avait pas été atteint depuis la Seconde Guerre mondiale. La tendance à l’augmentation du nombre de décès s’explique principalement par le vieillissement de la population et l’arrivée aux grands âges des générations nombreuses de l’après-guerre. Cette tendance devrait se poursuivre. Si l’espérance de vie continue d’augmenter (79,4 ans pour les hommes et 85,3 ans pour les femmes), les gains d’espérance de vie sont faibles. Au cours des dernières années, les progrès se sont particulièrement ralentis chez les moins de 45 ans. La France fait globalement partie des pays où la mortalité est la moins élevée d’Europe. Cette situation est liée à plusieurs facteurs dont une survie aux grands âges comparativement élevée, en partie du fait d’une mortalité par maladie cardio­vasculaire plus faible que dans la plupart des autres pays européens. La France est l’un des rares pays du monde dans lesquels cette cause de décès n’est pas la première (c’est le cancer depuis 1990). En revanche, la mortalité avant 65 ans, y compris celle des enfants, est relativement élevée. Le taux de mortalité infantile atteint 3,9 ‰ contre 2,0 ‰ ou 2,5 ‰ dans les pays scandinaves.

Auteur-e-s : Didier Breton (Université de Strasbourg-Ined), Nicolas Belliot (Université de Bordeaux, COMPTRASEC), Magali Barbieri (Ined), Hippolyte d’Albis (École de Paris, CNRS), Magali Mazuy (Ined).

 

Contact chercheur : didier.breton@ined.fr ou dbreton@unistra.fr