Véronique Hertrich

L’Ined a l’immense tristesse de vous annoncer la disparition de Véronique Hertrich

 

Directrice de recherche, Véronique Hertrich avait 55 ans. Elle avait rejoint l’Ined en 1992.

Elle terminait alors sa thèse sur les Bwa du Mali, une population qu’elle allait suivre pendant plus d’un quart de siècle. Elle tirera de ses observations une analyse très fine des changements matrimoniaux et familiaux préludant à l’entrée dans la transition démographique. Dès 1996, elle publie Permanence et changements de l’Afrique rurale. Dynamiques familiales chez les Bwa du Mali, un ouvrage remarquable à la croisée des questions ethnologiques, démographiques, économiques et sociales.  Dans ce travail d’enquête au plus près, Véronique a toujours eu à cœur de restituer auprès des populations étudiées ses résultats scientifiques, allant même jusqu’à organiser avec elles de petits sketchs de théâtre les impliquant. Autour des années 2000, elle a plus particulièrement étudié l’influence de la migration de travail des jeunes filles sur l’évolution de leurs comportements matrimoniaux et féconds et, ces dernières années, elle s’est surtout intéressée aux Dynamiques de la parentalité et de l’enfance en milieu rural africain (projet financé par l’ANR).

Bien que très attachée à ce travail en profondeur sur une population particulière, Véronique a toujours eu aussi le souci d’observer la diversité des situations nationales et internationales. Elle a en particulier rassemblé une grande base de données panafricaines sur la nuptialité qui lui a permis nombre d’analyses sur les spécificités des comportements matrimoniaux en Afrique et leur évolution depuis 1950. C’est ainsi qu’elle publie en 2017 « Trends in Age at Marriage and the Onset of Fertility Transition in sub Saharan Africa », un article de Population and Development Review qui fait déjà référence. Ces données sont aujourd’hui intégrées à la World Marriage Database des Nations unies. Histoire de ne pas rester monomaniaque, Véronique a même fait un temps irruption dans la recherche sur les causes de décès en Russie et dans les pays baltes. Là aussi, elle nous laisse un précieux héritage.

Dans tous ses travaux, Véronique Hertrich a toujours agi en bonne intelligence avec de nombreux collègues des pays concernés. Elle s’est aussi constamment attachée à prendre en compte les questions de genre dont l’étude est essentielle à la compréhension des comportements démographiques. C’est pourquoi elle a participé, depuis sa création, aux activités de l’UR Démographie genre et sociétés.

Parallèlement à son activité scientifique, Véronique Hertrich s’est investie pour donner toute sa place à la recherche sur les pays du Sud au sein de l’Ined. Responsable de l’UR Population et développement de 2006 à 2008, elle crée, en 2009, le pôle méthodologique Pôle Suds, et organise dans ce cadre de nombreuses Journées scientifiques sur des thèmes variés confrontant souvent les expériences des pays du nord et des pays du sud, ainsi que plusieurs modules de formation. En 2015 elle a oeuvré à la création d’une unité de recherche dédiée à la démographie des populations du Sud, DemoSud, que, malgré la maladie qui l’atteint gravement, elle co-animera avec Géraldine Duthé jusqu’à la fin 2018.

Véronique Hertrich était une organisatrice hors pair. En 2001 elle a accepté de coordonner l’organisation du Congrès international de la population de l’UIESP qui s’est tenu à Tours en 2005. Son dynamisme, son sens des contacts et son management énergique y ont fait merveille. De l’avis de tous, ce Congrès fut une prodigieuse réussite.

Au nom de l’Ined, nous transmettons à son fils et à sa famille nos sentiments de profonde sympathie tout en leur redisant notre grande admiration pour cette immense chercheure que vient de perdre la communauté scientifique internationale.

Mise en ligne le 21/02/2019