La motivation au pied de la lettre. Construction et expression des aspirations scolaires sur Parcoursup
Présenté par : Marie-Paule Couto & Marion Valarcher (CRESSPA / OSC) ; Discutante : Alice Olivier (Clersé, OSC)
Résumé
Cette communication s’intéresse à la manière dont les lycéen·nes construisent et expriment leurs aspirations scolaires dans un contexte renouvelé par la réforme de l’accès à l’enseignement supérieur. Votée en 2018, la loi « Orientation et Réussite des Étudiants » impose aux candidat·es la composition d’un dossier comprenant un CV et un projet de formation motivé. Elle prévoit également un accompagnement renforcé des élèves par deux professeurs principaux et des temps dédiés à la procédure d’orientation au lycée. Dans la lignée des travaux sur la « canalisation » des aspirations scolaires, cette présentation interroge les modalités d’encadrement et d’expression des aspirations en articulant des données nationales (l’enquête TSS de l’OVE) et locales (un corpus de lettres de motivation rédigées par des candidat·es à une licence de sociologie). Elle apporte un éclairage nouveau sur les inégalités de parcours selon la série du baccalauréat et sur la manière dont elles s’articulent avec celles relatives à l’origine sociale des élèves. Les matériaux montrent que les équipes pédagogiques adoptent deux types de stratégies d’accompagnement à l’orientation : elles ciblent et concentrent leur soutien sur les « bon.nes élèves » dans les filières technologiques et professionnelles, tandis que, dans les filières générales, elles délèguent certaines étapes du travail d’orientation aux familles. Or, ces différentes stratégies ont des effets sur la manière dont les élèves intériorisent les prescriptions scolaires et les restituent dans leurs lettres de motivation. Par le soutien resserré dont ils et elles bénéficient auprès des enseignants, les « bon·nes élèves » des filières technologiques et professionnelles intériorisent fortement les consignes et leur place dans la hiérarchie scolaire. Dans les filières générales, l’expression des aspirations est plus dépendante de leur capital familial.
Biographie de Marion Valarcher
Marion Valarcher est doctorante en sociologie et ATER à l’Université de Paris. Elle réalise une thèse sur les projets post-bac de lycéens et lycéennes à l’Observatoire Sociologique du Changement (Sciences Po). Sa recherche repose sur le suivi longitudinal par entretiens de deux cohortes d’élèves de lycée ainsi que sur des méthodes de classement de formations par jeux de cartes. Elle s’intéresse également aux usages d’Internet dans l’orientation depuis la mise en œuvre de Parcoursup en travaillant sur des historiques de navigation de lycéens et lycéennes. Elle a publié “ ‘Ça veut dire quoi « non-sélectif » ? Ils prennent tout le monde ?!’ La socialisation des lycéens et des lycéennes à la sélection”, Formation-Emploi, 2022 (à paraître).
Biographie de Marie-Paule Couto
Marie-Paule Couto est Maîtresse de conférences en sociologie à l’Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis, Chercheuse au Cresppa-CSU et membre du collectif Paris-Ouest-France qui mène chaque année des enquêtes avec et sur les étudiants de plusieurs universités partenaires. Elle assure actuellement une mission de chargée d’études et de recherche à l’Observatoire nationale de la Vie Étudiante. Ces derniers travaux portent sur l’accès à l’enseignement supérieur, les trajectoires étudiantes et la socialisation universitaire. Avec Fanny Bugeja-Bloch et Leïla Frouillou, elle a publié notamment « Parcoursup : les prémices d’un accroissement de la stratification sociale et scolaire des formations du supérieur », Agora débats/jeunesses, 89, 2021 (à paraître) et « Les effets de parcoursup sur les orientations universitaires des femmes de milieux populaires », in L’université pour quoi faire ?, Stéphane Beaud et Mathias Millet, La vie des idées, PUF, Paris, 2021.