Parents et enfants dans les familles immigrées : vivre ensemble ou séparés.
Collection : Documents de travail
n° 281, 2023, 33 pages
La corésidence des enfants avec leurs parents est l’une des normes les mieux établies du « faire famille ». Dans la France contemporaine, en dépit de la diversification des modèles familiaux, la trajectoire de résidence supposée normale des enfants est celle d’une vie commune avec leurs parents de leur naissance jusqu’au passage à l’âge adulte. Ce modèle n’est pas universel : les pratiques de cohabitation parents-enfants peuvent varier à la fois pendant l’enfance et au moment du passage à l’âge adulte. Dans quelle mesure l’expérience de la migration affecte-t-elle les configurations résidentielles des familles ? A quel point les immigrés adoptent-ils des modes spécifiques d’habiter entre parents et enfants ? Les résultats montrent que 25% des immigrés ont eu au moins un enfant né à l’étranger. La moitié de ces enfants a migré avec leur(s) parent(s), un quart a rejoint son/ses parent(s) en France, le dernier quart résidant toujours à l’étranger au moment de l’enquête. Le regroupement familial apparait comme un processus à la fois lent et partiel, en particulier parmi les Subsahariens : dix ans après le départ de leur(s) parent(s), près de 70% des enfants d’immigrés d’Afrique subsaharienne sont encore dans leur pays de naissance. Au moment du passage à l’âge adulte, des singularités sont également observées. Les enfants d’immigrés sont bien moins souvent indépendants : parmi les 18-35 ans, ils sont 55% à vivre en dehors du domicile parental, quand la proportion atteint 75% en population majoritaire. Leur sortie du domicile parental est plus tardive et, lorsqu’ils prennent leur indépendance, ils ont davantage tendance que les personnes de la population majoritaire à demeurer à proximité de leurs parents (28% des fils et filles d’immigrés qui ont décohabité résident dans la même ville que leurs parents contre 18% et 20% chez ceux et celles de la population majoritaire parmi les 18-35 ans). Le chapitre examine ce qui, dans ces spécificités, relève de contraintes structurelles (politiques ou socioéconomiques) et/ou de particularités socioculturelles.