Population 2014, n° 1
2014
ARTICLES
- Concordance entre origine ethnique déclarée et origines ancestrales chez les Gaspésiens - Hélène Vézina, Marc Tremblay, Ève-Marie Lavoie, Damian Labuda
- La mobilité ethnique des Autochtones du Canada entre les recensements de 2001 et 2006 - Éric Caron-Malenfant, Simon Coulombe, Eric Guimond, Chantal Grondin, André Lebel
- Variations spatiales des structures de ménage en Allemagne au XIXe siècle - Mikołaj Szołtysek, Siegfried Gruber, Sebastian Klüsener, Joshua R. Goldstein
- Évaluer la situation budgétaire de son ménage, en tête-à-tête avec l’enquêteur ou en présence du partenaire - Patrick Festy, Joëlle Gaymu, Marc Thévenin
- Le célibat masculin involontaire en Chine rurale : une approche par le réseau social - Lige Liu, Xiaoyi Jin, Melissa J. Brown, Marcus W. Feldman
- Bibliographie critique : Enfants, parents
Concordance entre origine ethnique déclarée et origines ancestrales chez les Gaspésiens
Hélène Vézina, Marc Tremblay, Ève-Marie Lavoie, Damian Labuda
L’identité ethnique d’un individu relève d’un sentiment d’appartenance plus ou moins prononcé à un groupe possédant certaines caractéristiques propres. Dans les recensements et de nombreuses enquêtes quantitatives, une question sur l’origine ethnique est posée aux participants et on peut se demander dans quelle mesure les réponses fournies correspondent aux origines ancestrales des répondants. À partir d’informations généalogiques portant sur près de 400 individus résidant dans la région de la Gaspésie (Est du Québec), cette étude compare l’origine déclarée par les participants à celles des premiers immigrants de leur ascendance établis sur le sol québécois. Les généalogies des participants ont été reconstruites, les ancêtres immigrants identifiés et leurs origines géographiques documentées. Les résultats montrent que l’origine déclarée par les participants gaspésiens trouve une correspondance sur le plan des origines ancestrales. Bien que presque tous les participants aient des ancêtres immigrants d’origines diverses, le groupe d’appartenance est, dans la majorité des cas, le plus représenté parmi ces ancêtres. En particulier, les répondants ont davantage tendance à s’identifier à leurs origines paternelles qu’à leurs origines maternelles lorsque celles-ci diffèrent. Malgré une histoire de peuplement diversifiée et un métissage important, les Gaspésiens ont donc conservé un sentiment d’appartenance ethnique qui reflète aujourd’hui encore une certaine réalité démographique et génétique.
La mobilité ethnique des Autochtones du Canada entre les recensements de 2001 et 2006
Éric Caron-Malenfant, Simon Coulombe, Eric Guimond, Chantal Grondin, André Lebel
Cet article présente les résultats d’une analyse de la mobilité ethnique intragénérationnelle des Autochtones au moyen d’une source de données qui permet, pour la première fois au Canada, une estimation directe du phénomène : l’appariement entre les recensements de la population de 2001 et 2006. La mobilité ethnique intragénérationnelle, en d’autres termes les changements de déclaration de l’identité autochtone au cours de la vie, a contribué de manière importante à l’accroissement des populations métisses et indiennes de l’Amérique du Nord vivant hors des réserves indiennes au cours des dernières décennies. Cependant, les estimations publiées jusqu’ici reposant toutes sur des mesures indirectes, elles ne permettaient qu’une connaissance limitée des caractéristiques qui y sont liées. L’analyse, descriptive puis multivariée, montre que les gains de population que connaissent les Autochtones en raison de la mobilité ethnique résultent en réalité de flux multidirectionnels liés à certaines caractéristiques clés, comme le fait d’avoir des origines ethniques mixtes. L’article explore également les effets de la mobilité ethnique sur la composition sociodémographique des populations autochtones, leur répartition géographique étant notamment modifiée suite aux changements qui touchent la déclaration de l’identité aux recensements.
Variations spatiales des structures de ménage en Allemagne au XIXe siècle
Mikołaj Szołtysek, Siegfried Gruber, Sebastian Klüsener, Joshua R. Goldstein
L’Allemagne du XIXe siècle est un laboratoire particulièrement intéressant pour l’étude des différences démographiques entre régions, et pourtant les structures de la famille à cette époque dans cette partie de l’Europe restent peu explorées. Cet article analyse la variabilité des situations domestiques avec une mesure agrégée de la complexité des ménages fondée sur les statistiques publiées du recensement allemand de 1885. Des méthodes descriptives et des techniques de modélisation spatiale permettent d’examiner les hypothèses existantes sur les déterminants de la complexité des ménages. Les variations régionales de la structure des ménages sont-elles associées aux variations concernant l’emploi agricole, les pratiques d’héritage, l’appartenance ethnique et d’autres caractéristiques socioéconomiques ? Les régions où la complexité des ménages était faible se concentrent dans le sud-ouest et le sud de l’Allemagne, et celles où la complexité était forte dans le nord et le nord-est. Quant aux différences macro-régionales socioéconomiques et culturelles, dont on sait qu’elles existaient en Allemagne à la fin du XIXe siècle et qu’on pensait décisives, elles ne s’avèrent que faiblement associées aux schémas spatiaux de complexité des ménages. Ces résultats sont cohérents avec l’hypothèse de Ruggles (2009), selon laquelle les variations spatiales des structures de ménage sont essentiellement liées au degré d’emploi dans l’agriculture et aux caractéristiques démographiques.
Évaluer la situation budgétaire de son ménage, en tête-à-tête avec l’enquêteur ou en présence du partenaire
Patrick Festy, Joëlle Gaymu, Marc Thévenin
Bien que l’instruction soit généralement donnée aux enquêteurs de passer le questionnaire en tête-à-tête avec l’enquêté(e), une part importante des entretiens sont réalisés en présence du partenaire, en particulier aux âges avancés - environ 40 % dans l’enquête Études des relations familiales et intergénérationnelles (Erfi, 2005) quand l’enquêté(e) a 50 ans ou plus. Les couples dont le conjoint assiste à l’entretien n’ont pas les mêmes caractéristiques que ceux qui répondent en tête-à-tête à l’enquêteur, les différences entre les deux groupes étant plus marquées lorsque le répondant est une femme. À la question sur la situation financière du ménage, rien ne différencie les réponses masculines et féminines, pour l’ensemble de l’échantillon, mais les hommes déclarent plus souvent avoir des difficultés à joindre les deux bouts que les femmes lorsque l’entretien se déroule en tête-à-tête, et c’est l’inverse en présence de leur conjoint : ils mentionnent alors plus d’aisance financière que les femmes. Les facteurs associés aux difficultés budgétaires sont toutefois identiques pour les hommes et les femmes, selon qu’ils sont interrogés en tête-à-tête ou en présence de leur conjoint. Il est difficile de dire si, en règle générale, la présence du conjoint améliore ou détériore la qualité des réponses des enquêtés, mais l’interprétation qu’on peut donner de celles-ci dépend pour partie des conditions de passation des questionnaires.
Le célibat masculin involontaire en Chine rurale : une approche par le réseau social
Lige Liu, Xiaoyi Jin, Melissa J. Brown, Marcus W. Feldman
Si un homme dispose d’un réseau d’intermédiaires, ses chances de se marier en sont-elles accrues ? En exploitant des données d’enquête recueillies en 2008 dans le district X de la province d’Anhui en Chine, les auteurs analysent les déterminants de la probabilité de premier mariage selon le type de réseau d’un échantillon d’hommes âgés de 18 à 50 ans vivant en milieu rural (N = 412). L’âge au premier mariage des hommes se concentre entre 22 et 27 ans, et la probabilité de se marier chute fortement après 28 ans, pour devenir quasiment nulle au-delà de 34 ans. Le type de lien qui existe entre l’individu et les membres de son réseau a beaucoup plus d’influence sur la probabilité de primo-nuptialité masculine que la taille du réseau. Les hommes sans réseau présentent un risque plus important de rester célibataires. Pour ceux qui en ont un, les types de réseau ont des effets légèrement différents : ce sont les réseaux familiaux qui renforcent le plus la probabilité de mariage, particulièrement aux âges auxquels la plupart des hommes se marient. La probabilité de premier mariage des hommes qui bénéficient d’un réseau mixte, à la fois familial et non familial, est la plus faible : ceci peut traduire la stratégie de recherche de conjoint de certains hommes qui ont plus de difficultés pour se marier.
Prix TTC : 20,00 €