La résidence alternée des enfants après une séparation : un effet positif sur l’emploi des mères

Communiqué Publié le 20 Octobre 2022

Comment l’activité professionnelle des mères varie-t-elle selon le mode de résidence des enfants après une séparation ? À partir d’un très grand échantillon de mères (60 700) âgées de 20 à 55 ans qui ont divorcé ou rompu un pacs, Carole Bonnet et Anne Solaz, Directrices de recherche à l’Ined ainsi que Bertrand Garbinti, chercheur au CREST-IP Paris, ont mis en évidence que celles dont les enfants sont en résidence alternée après un divorce ou une rupture de pacs sont plus susceptibles de travailler que celles qui ont la garde principale de leurs enfants. Ce type d’arrangement peut en effet améliorer la conciliation famille-travail des mères et faciliter le retour à l’emploi des mères sans activité professionnelle avant la séparation.

Un recours en hausse à la résidence alternée des enfants en France et ailleurs

Si la résidence principale des enfants chez la mère avec visites régulières chez le père les week-ends reste l’arrangement le plus fréquent après la rupture du couple parental, le nombre d’enfants en résidence alternée a considérablement augmenté dans de nombreux pays développés, particulièrement les pays de l’Europe du Nord. Ce mode de résidence est choisi dans plus d’un divorce sur 3 en Belgique, Suède et Norvège. La garde alternée s’est aussi « démocratisée » : initialement utilisée par un groupe restreint de parents socio-économiquement favorisés, les familles concernées sont désormais de plus en plus diverses. Cette tendance est liée à l’évolution des comportements vers un meilleur partage de la parentalité et accompagnée par les politiques publiques et la législation. En France comme ailleurs, la résidence alternée a également beaucoup augmenté et concernait selon les chiffres les plus récents (2012) plus d’un divorce sur cinq, deux fois plus que 10 ans auparavant.

Les mères isolées ont un risque de pauvreté et de chômage accru après le divorce

Les mères séparées et leurs enfants sont toujours confrontés à des risques plus élevés de pauvreté. Trouver un nouvel emploi ou en conserver un permet d’éviter une chute drastique du niveau de vie lors d’une séparation, et peut ainsi contribuer à éviter ces entrées en pauvreté. En raison de conflits d’horaires entre famille et travail, la charge entière de la famille après une séparation peut entraver les possibilités d’emploi et d’obtention d’un revenu adéquat. Les mères isolées avec de jeunes enfants constituent l’un des groupes les moins en emploi. Le taux de chômage des mères isolées est deux fois plus élevé (17% en 2018[1]) que celles en couple (8%).

Les mères ayant leurs enfants en résidence alternée sont plus souvent en emploi

La résidence alternée a des effets positifs et importants sur l’emploi dans l’année qui suit le divorce ou la rupture de pacs, par rapport à la résidence principale chez la mère. Le taux d’emploi des mères avec enfants en garde alternée est supérieur de 20 points à celui des mères qui en ont la garde principale. Les bénéfices de la résidence alternée diffèrent selon la situation professionnelle des mères au moment de la séparation. En utilisant la base de données administrative des déclarations de revenu, la figure 1 montre que les femmes précédemment inactives et celles qui appartenaient aux ménages les plus pauvres sont plus susceptibles de travailler lorsqu’elles ont leurs enfants en résidence alternée plutôt qu’en garde principale. C’est également vrai pour les mères séparées ayant un jeune enfant, et pour celles ayant trois enfants ou plus.

Même si les modalités de résidence des enfants ne relèvent pas de la politique de l’emploi, les politiques favorisant un partage plus égalitaire des responsabilités parentales, comme le soutien à la résidence alternée, peuvent avoir des effets sur l’autonomie financière des femmes et le niveau de vie des enfants de familles monoparentales à court terme, et aussi, potentiellement, à long terme sur les droits à la retraite de ces mères.
 
[1] https://www.ofce.sciences-po.fr/pdf-articles/actu/helene.pdf

DONNÉES UTILISÉES

Cette étude utilise la base de données administrative exhaustive (de la déclaration d’impôt sur le revenu et taxe d’habitation) qui contient des informations détaillées sur le revenu, la structure familiale et les modes de résidence suivant le divorce. À partir d’un très grand échantillon de mères (60700) âgées de 20 à 55 ans qui divorcent ou rompent un pacs en 2009 et qui sont observées l’année précédente et suivante, la probabilité d’être en emploi suite au divorce en fonction du mode de résidence des enfants est estimée à l’aide d’un modèle qui tient compte des caractéristiques particulières des mères et du caractère non aléatoire du mode de résidence des enfants.

Pour en savoir plus :

Carole Bonnet, Bertrand Garbinti et Anne Solaz, Does Part‑Time Mothering Help Get a Job? The Role of Shared Custody in Women’s Employment, European Journal of Population

Cet article a été publié dans une revue scientifique référencée par les instances d’évaluation.