Porter l’enfant d’un.e autre en Inde : analyse d’une pratique biomédicale controversée

le Lundi 20 Juin 2016 à l’Ined, salle Sauvy, de 11h30 à 12h30

Présenté par Virginie Rozée (Ined) ; discutant : Christophe Guilmoto (Ceped/IRD)

La gestation pour autrui (GPA), quand une femme porte un enfant pour le compte d’autrui, est une pratique aujourd’hui médicalisée particulièrement controversée, surtout lorsqu’elle fait l’objet d’une transaction financière entre des femmes de pays moins développés pour des individus ou couples aisés, provenant de pays riches. C’est le cas notamment de l’Inde, qui jusqu’à récemment, a développé une importante offre médicale, locale et internationale, en matière d’assistance médicale à la procréation, y compris en GPA. La GPA en Inde mobilise la presse du monde entier, qui présente souvent le pays comme une « usine à bébés ». Or, si la pratique fait l’objet de débats publiques, politiques et académiques croissants, peu de données empiriques documentent cette réalité. Dans la dynamiques des quelques recherches existantes, anthropologiques pour la plupart, nous avons mené pendant deux ans une étude de terrain, tout d’abord à Mumbai, puis à Chennai et New Delhi (Programme Marie Curie de la Commission européenne). Notre objectif était d’explorer cette pratique, dans une perspective de genre, depuis les discours et les expériences des protagonistes de la pratique (médecins, parents d’intention et gestatrices). A partir des entretiens réalisés, l’analyse porte ici sur les raisons du « boom » de la GPA en Inde, les profils sociodémographiques et les motivations des protagonistes, des gestatrices surtout, l’organisation biomédicale du travail reproductif et les représentations sociales liées à cette pratique. Nous verrons que la GPA en Inde, dans la façon dont elle est décrite, organisée et vécue, est révélatrice de la condition des femmes, reflétant une réalité sociale indienne particulièrement complexe, hiérarchisée et patriarcale.

 

Virginie Rozée

Virginie Rozée est sociologue à l’INED (UR3 « Fécondité, famille, sexualité » et UR14 « Santé sexuelle et reproductive ») et membre du Groupe d’intérêt sur « les aspects socioculturels de la (in)fertilité » de la Société européenne sur la reproduction humaine et l’embryologie (ESHRE). Ses recherches portent sur le genre et la reproduction, et plus récemment sur l’articulation entre les nouvelles techniques de reproduction et le genre dans la société globale. Elle vient de réaliser, dans le cadre du Programme Marie Curie de la Commission européenne, une étude de terrain de deux ans sur la gestation pour autrui en Inde.