Exile in a context of authoritarian rule

This axis focuses on the social relationships that are established, preserved or modified when mobility trajectories are the consequence of deportation or forced displacement.

Les mobilités sous contrainte résultent de politiques répressives mises en œuvre par des États ou sont la conséquence de conditions qui prévalent dans les territoires de départ : crises économiques, sociales, situations de guerre et de conflits, etc. L’Europe du 19ème et 20ème siècle est traversée par d’immenses flux de population déplacées de force par les autorités des divers États ou Empire de cet espace.
L’Europe centrale et Orientale est alors particulièrement soumise à des politiques qui déportent les populations pour réprimer ou occuper, que ce soit après la 1ère guerre mondiale, à la veille puis après la Seconde guerre mondiale, durant les guerres de décolonisation, lors de l’éclatement de l’URSS et du bloc des pays de l’Est. L’ancrage dans le temps long permet en effet un regard original, les trajectoires des personnes s’inscrivent dans une histoire souvent pluri générationnelle. L’exil est enfin abordé à partir de ses manifestations contemporaines dans les villes d’Europe occidentale à partir de la seconde décennie du 21ème siècle.

L’objectif est d’établir une relation entre une approche politique du déplacement et de son usage économique, politique, social et les parcours d’intégration ou d’exclusion des individus, familles et groupes qui les subissent. Il s’agit aussi d’analyser les circulations d’informations qui permettent aux déplacés de s’approprier une partie de leur territoire d’exil, d’établir des relations d’échanges et d’interconnaissances avec les populations présentes, tout en préservant des liens avec leur territoire d’origine.
L’objet de ces recherches est aussi d’appréhender ces questions dans une temporalité qui ne s’arrête pas à la période d’exil mais considère la trajectoire comme un tout en lui donnant une profondeur temporelle qui dépasse l’individu lui-même pour s’intéresser aux diverses générations qui se succèdent une fois la situation d’exil terminée.
Cet axe a une dimension historienne importante, tant parce qu’il traite de processus qui se sont développés dans le passé, que parce qu’il insère les processus contemporains dans une histoire longue des politiques de déplacement ainsi que dans des histoires familiales qui dépassent la génération.
Cet axe a aussi une dimension transnationale. Ceci tient bien entendu à la nature même des trajectoires d’exil, qui, souvent, conduisent les personnes et leurs descendants à traverser les frontières tout en restant attachées à leurs territoires d’origine – c’est le cas par exemple lorsqu’ils forment une diaspora. Mais cela tient aussi aux terrains étudiés, qui sont avant tout ceux de l’Europe centrale et orientale, même si des terrains coloniaux permettent de fructueuses comparaisons.

Cet axe est par ailleurs fondé sur le croisement de sources extrêmement diverses, permettant de mener des analyses qualitatives et quantitatives. Le point commun de ces sources est de porter l’attention sur l’individuel (ou le familial).
Deux terrains sont étudiés. L’objet principal de cet axe est l’étude des déportations staliniennes menées sur les territoires occidentaux de l’URSS, à partir de l’annexion de ces territoires en 1939-1940 et jusqu’en 1952. Cette recherche traite aussi bien du processus de déportation, de l’insertion des personnes déportées sur les lieux de relégation, de leur devenir après leur libération. Les sources sont très diverses. Il s’agit aussi bien de dossiers policiers que d’entretiens auprès de ceux qui ont vécu ces déportations, en passant par les diverses sources administratives inscrivant l’individu dans des dossiers, des registres, mais aussi les archives personnelles et les sources iconographiques conservées par exemple dans de telles archives. Il s’agit aussi d’observations sur des terrains qui voient ont vu passer les exilés et qui permettent ainsi, à nouveau, d’aborder ces questions par l’intermédiaire d’individus, soit par leur témoignage, soit par les traces qu’ils ont pu laisser dans les archives, soit par les récits de personnes qui les ont connues, soit, enfin par les lieux qu’ils fréquentent, ou ont fréquentés. Ce dernier point est loin d’être secondaire. Il croise nécessairement les politiques de regroupement, desserrement, enfermement, mais aussi les dispositifs et lieux d’accueil multiformes que les exilés rencontrent sur leur chemin.
Ce projet affirme une volonté d’innover non seulement dans la manière de collecter des sources mais aussi dans la manière de restituer et valoriser les résultats des recherches. En effet, il s’inscrit dans un projet éditorial développé par les éditions de l’Ined à partir d’une profonde reconfiguration du site Archives sonores – mémoires européennes du goulag (museum.gulagmemories.eu) .
Un second projet porte sur la période contemporaine et l’exil en France. Le terrain choisi pour l’observation des trajectoires d’exil est celui des lieux où les personnes ont accès à l’eau et à l’hygiène. S’intéressant aux dispositifs permettant aux pauvres et aux migrants de conserver une place dans la ville, des modèles « hybrides » émergent, conjuguant l’action publique, l’économie sociale et solidaire et le monde associatif. Les modes de « prise en charge » des exilés permettent d’interroger plus largement le rôle de ces établissements dans les dynamiques locales, car elles sont aussi opérantes à l’égard de populations non exilées, mais victimes de précarité sanitaire. Ainsi, autour de la question de l’accès à l’eau en ville, se dessine une problématique plus générale de l’accueil et du rejet, de l’intégration et de l’exclusion.